Merci Christophe, il va de soi que je t’apprécie également énormément, mais tu le sais déjà.
Je vais prendre un exemple pour que tu puisses comprendre ce que je veux dire
Lors d’une expo, M. Suzuki mettra une magnifique yamadori couvert de merveilleux bois mort dans un tokonoma.
Bien au centre, il placera un superbe kakémono qui donne une allusion à la saison.
En opposé de l’arbre, il mettra un superbe kusamono avec de trois plantes dont l’une a de jolies fleurs.
La présentation est parfaite … selon M. Suzuki, si tu remarques, je ne dis pas qu’elle n’est pas bonne, elle est même exellente.
Maintenant, tu demandes à M. Andô de revoir la présentation selon son enseignement.
Il commence par enlever le magnifique yamadori couvert de merveilleux bois mort qui selon lui ne se place pas dans un tokonoma.
Il supprime également le superbe kakémono qui toujours selon lui ne se place pas dans un tokonoma avec un arbre.
Il supprime également le kusamono avec de trois plantes dont l’une a de jolies fleurs.
Tu vois, le tokonoma est vide, ça fait quand même une sacrée différence.
Devant nos yeux ébahis et pleins de points d’interrogation, M. Andô nous sourit avec son regard malicieux et nous explique.
Si le yamadori est tout à fait honorable, il n’en reste pas moins qu’il n’a pas été élevé pour être un bonsaï.
Dans le tokonoma était la place du seigneur ou du maitre de maison, un japonais ne mettra pas un mal élevé à la place du seigneur, il ajoutera qu’un yamadori restera toujours un arbre extravagant.
Il continuera son explication en disant que dans le tokonoma c’est l’arbre la vedette, c’est lui qui doit en premier attirer l’œil pas le kakémono.
Un bois mort, bien blanc représente la souffrance et la mort, un Japonais ne met pas dans sa maison quelque chose qui représente la mort
Ensuite, il parlera du kusamono et nous expliquera que c’est le shitakusa qui accompagne un arbre et non un kusamono
Que le shitakusa est composé d’une seule herbe et qui plus est, doit être très discrète, donc pas d’herbes panachées, qu’elles soient panachées de rouge ou de jaune.
Que ce shitakusa peut aussi être composé d’UNE mousse, UNE fougère, UN ophyopogon, Un carex, Une prèle, Un bambou nain, mais le maitre mot reste Discrétion.
Voila les explications que Monsieur Andô nous donnerait, je le sais parce que je l'ai vécu, c’est ce qu’il nous a répondu lors de ses cours, mais ça ne s’arrête pas là, même dans l’art de former un arbre, il y a de grosses différences.
Par exemple, on dit que le nébari du lettré n’a pas d’importance …. Cette affirmation me semble aberrante dans un art ou le moindre détaille a son importance.
La plupart des bonsaïka travaillent du bois mort dans un bunjin, une fois de plus, voilà une affirmation bien bizarre pour un arbre réputé comme féminin.
Pour Monsieur Andô, le nebari doit être parfait et le bunjin ne doit pas avoir de jin ou de shari.
Ce qui est remarquable ave ce Sensei, c’est qu’il explique sans cesse la raison et le pourquoi des choses, il n’y a jamais de c’est comme ça tellement stérile
Une fois encore, je ne dis pas que c’est la seule façon de voir le bonsaï, je dis simplement haut et fort que sa vision est différente de M. Suzuki.
Son cours est passionnant, nous restons tous pendu a ses lèvres quand il nous explique le pourquoi des ces règles.
Voilà, je vous fais le cadeau de mes notes de cours sur les plantes d’accompagnements selon M. Andô
Vous verrez que là aussi c’est bien différent de ce qu’on a expliqué jusqu'à présent.
Fiche établie selon l'enseignement du bonsaï traditionnel de M. Andö.
Les Shitakusa.
Dans une présentation, le bonsaï est l’homme (le mari) et le Shitakusa la femme, l'épouse, comme un couple, ils doivent être en harmonie.
Le Shitakusa est secondaire par rapport au bonsaï, mais il est d’une importance capitale à la présentation, il est indispensable et contribue grandement au succès de celle-ci, de ce fait, le succès d’une exposition découle également de sa beauté.
Il est important de pouvoir disposer de plusieurs Shitakusa de différentes variétés et de formes pour avoir le choix et laisser le temps au wabi sabi de s’installer.
Leur culture demande énormément de soins et plusieurs années avant d'être présentables
Au Japon, il y avait des entreprises qui ne cultivaient que des shitakusa pour les louer lors des grandes expositions.
Un Shitakusa doit être :
Sobre et discret.
Une mousse, une fougère, un ophyopogon, un carex, prèle, un bambou nain, …
Pas de plante grasse (sedums, joubarbes).
Pas de plante à fleurs, même chose pour les baies ou les fruits.
L’herbe doit avoir un feuillage fin et discret, pas de feuillage panaché jaune ou rouge.
Les maîtres mots sont Sobriété et Discrétion. (Comme l'épouse japonaise)
D'une seule herbe, parce que si on place plusieurs variétés d’herbes, la plus vigoureuse d'entre elles prendra tôt ou tard, le pas sur les autres et les étouffera.
On dit souvent que tout est vert et que ça ne marque pas la saison, mais au fil du temps il se crée d’infimes modifications qui donnent des indications quant à la saison, ce sont ces modifications qu’il faut favoriser et rechercher par le Mochicomi, elles apporteront le wabi sabi.
Les Saya tsu (herbes sauvages de montagne) sont idéales.
Culture :
La première année, au printemps, on coupe la moitié des racines et on place l’herbe dans un Asabachi (pot de 5 cm de haut).
L’année suivante, on coupe à nouveau les racines et on place l’herbe dans un Sarabachi (pot de 3 cm de haut).
On la cultive dans ce pot plusieurs années.
Au bout de quelques années de culture, on obtient une herbe très dense "Aibano nazumi".
Il faut les protéger, attention aux oiseaux ainsi qu'aux limaces et escargots.
Il faut enlever les feuillages morts et vérifier la présence d’insectes tout au long de l'année.
Ne jamais donner d’engrais et jamais trop d’eau, les racines ne favorisent pas le drainage.
Pas trop de soleil non plus et bien aéré.
On rempote chaque année dans de l’akadama grains moyens.
Un pot rond facilitera l’orientation pour les présentations.
Dans un pot le plus plat sera le mieux.
Dans un pot profond (Fukabachi) l’herbe se développe trop fort et monte trop haut, le wabi sabi ne peut pas s’installer.
Quand une feuille, une herbe devient trop grande, on la coupe à la base (3 mm ) de plus petites vont repousser.
On retaille régulièrement du printemps à juillet.
En présentation avec un arbre en forme de cascade, l'herbe sera plus haute.
L'herbe peut dépasser la tablette du bonsaï, sa direction est vers l'arbre.
Un minimum de dix ans de mochikomi sera nécessaire pour la Shitakusa...
Lexiques :
Fukabachi : Premier pot de culture, l’équivalent de nos pots de fleurs.
Asabachi : Pot de culture de 5 cm de profondeur.
Sarabachi : Pot de culture de 3 cm de profondeur.
Aibano nazumi : Herbes très denses (cultivée depuis plusieurs années).
Saya tsu : Herbes sauvages de montagne.
kusamono bonsaï : C’est une ou plusieurs plantes présentées dans un petit pot sans accompagner un arbre, on peut la présenter dans le jardin, mais aussi dans la maison, le salon, la salle de bain, … elle est présentée seule.
Contrairement aux Shitakusa, les plantes à fleurs à baies ou à fruits peuvent être incluses à cette forme de présentation.
Kusamono : C’est la même chose que le Kusamono bonsaï, mais en beaucoup plus grand, les herbes et autres plantes y sont et en grande quantité.
Mochicomi : Somme des travaux quotidiens que l’on effectue sur nos arbres et nos plantes.